Comment évaluer et réparer un préjudice écologique ?
Le code civil a récemment été doté de dispositions concernant le préjudice écologique, son évaluation et sa réparation. La Cour de Cassation est venue donner des éclairages sur leur application concrète.
La prise en compte de la protection de l’environnement est récente dans le code civil, depuis la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages qui a créé le nouvel article 1246 du code civil :
« Toute personne responsable d’un préjudice écologique est tenue de le réparer. »
C’est quoi un préjudice écologique ?
Le préjudice écologique s’entend, selon l’article 1247 du code civil, de « toute atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions collectifs tirés par l’homme de l’environnement. » Il s’agit donc d’un préjudice écologique objectif. À titre d’exemple, il est possible de citer : le mazoutage d’oiseaux sauvages, la destruction volontaire ou involontaire d’espèces, la pollution d’une rivière, la capture et la vente d’espèces protégées…
Réparer ou indemniser ?
Les textes posent un principe de réparation en priorité par nature, via des mesures de remise en état (par exemple le ré-empoissonnement d’une rivière à la suite de sa pollution). L’indemnisation sous la forme de dommages et intérêts intervient seulement en cas d’impossibilité de droit ou de fait ou d’insuffisance des mesures de réparation (article 1249 du code civil).
Cette indemnisation sous la forme de dommages et intérêts soulève des difficultés relatives à l’évaluation du montant d’indemnisation dans le cas d’un dommage irréversible comme la disparition définitive d’une espèce.
Les espèces et habitats protégés n’ont pas de valeur vénale
La Chambre criminelle de la Cour de Cassation est venue préciser dans un arrêt récent les conditions de réparation du préjudice écologique : les espèces et habitats protégés n’ont pas de valeur vénale et donc l’évaluation du montant de la réparation n’est pas possible en fonction de la valeur vénale de ces derniers (voir en ce sens : Cour de Cassation, 26 mars 2024, n°23-81.410). Dans ces cas-là, l’indemnisation peut alors être évaluée par rapport au coût de réintroduction de l’espèce, multiplié par le nombre d’individus à réintroduire.
Enfin, dans l’hypothèse d’une réparation sous la forme de dommages et intérêts, la somme allouée doit être spécifiquement affectée à des actions de réparation environnementale.
Qui pour agir en justice en cas de préjudice écologique ?
L’article 1248 du code civil dresse la liste des personnes qui ont qualité et intérêt à agir afin d’obtenir la réparation d’un préjudice écologique : l’État, l’office français pour la biodiversité, les collectivités territoriales et leurs groupements dont le territoire est concerné, les établissements publics ainsi que les associations agréées ou créées depuis au moins cinq ans et qui ont pour objet la protection de la nature et la défense de l’environnement.
Mégane BASSET
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